03 juin 2010

L'amoureux, les hormones et le nid

 L'amoureux me trouve un brin excessive ces jours-ci.

Je ne sais pas où il peut avoir pêché une telle chose.

Ce n'est pas parce que je projette de peinturer la chambre de ma future poulette, de faire tout le lavage-séchage-sur-la-corde-à-linge-et-pliage de la maisonnée, de frotter les planchers à quatre pattes, de faire le ménage du frigo de fond en comble, de trier les vêtements qui ne font plus aux filles, d'aller acheter ce qu'il me manque pour l'arrivée de la petite demoiselle, de cuisiner des biscuits choco-gruau, deux pains aux courgettes et un rôti de boeuf à la moutarde et tout ça dans la même journée, que l'on peut me qualifier d'excessive.Franchement. Il s'énerve pour un rien lui.

Pis pour être honnête, ça m'écoeure en sale que les journées n'aient que 24 heures. Parce que j'aurais voulu installer les moulures dans la chambre de bébé # 3, monter sa table à langer et laver tous ses petits pyjamas pour ensuite les placer dans sa commode.

J'aurais eu aussi assez d'énergie pour faire apprendre les tables de multiplications de Filou jusqu'à 18. Pour remettre un peu d'ordre dans le garde-robe d'entrée et pour remplir mon congélo de plats tout prêts pour les soirées où j'ai envie de faire la grève du four.

"Chéri, tu voudrais m'aider à monter le trampoline. C'est une belle journée pour ça, non?"

Lui, il croule sous une pile de productions écrites à corriger (il est prof de français au secondaire). Que mes filles puissent sauter au soleil aujourd'hui, c'est le cadet de ses soucis. Alors, vous imaginez le regard qu'il m'a lancé?

"Ge, ça ne te tente pas de relaxer un peu? D'écouter la télé, d'aller prendre un bain, d'appeler Dany. Je ne sais pas moi, mais quelque chose qui te permettrait de te reposer."

Euh... non! Pas l'ombre d'une envie. Mais surtout pas le temps. Tu parles d'une idée!

Cette volonté de tout astiquer, de tout ranger, de tout préparer m'obsède complètement. Il ne peut pas comprendre ça, lui. C'est un homme. Avec tout ce que ça comporte. Lui, il ne pense qu'à sa pile de correction. Que sa fin d'étape qui approche. Et qu'il doit remettre ses notes de bulletin au pc. Il ne voit pas tout le boulot qu'il reste accomplir. Tout ce qu'il faut faire avant le jour J. Tout ce qu'il faut prévoir pour l'arrivée de Boum Boum.

Voyez, là, j'écris ma chronique et j'ai la forte impression de perdre mon temps. Parce qu'à la place d'être assise bien tranquillement devant mon ordi à laisser mes doigts pianoter sur mon clavier, je pourrais installer le luminaire dans la chambre du bébé. Je pourrais aller faire l'épicerie pour les six prochains mois. Je pourrais passer l'aspirateur dans ma voiture.

"Mais qu'est-ce qu'il se passe avec toi, chérie?", me demande-t-il, inquiet, devant ma panique du peu-de-temps-qu'il-nous-reste.

Et voilà, je pète les plombs devant son insensibilité face à mon sentiment d'urgence. Devant sa nonchalance envers ma liste longue de six pieds.

"Hé! Il nous reste QUE 13 semaines pour TOUT faire. On n'y arrivera pas si on ne s'y met pas maintenant. Là. Tout de suite. Right fucking now. Parce qu'on pourrait avoir l'air fin en sale quand la petite va arriver et que son lit sera encore en morceaux dans la remise. On va la coucher où, hein? Dans un tiroir?"

"Mais Ge, c'est quand même trois mois ça. Trois très longs mois. Ça ne prend pas trois mois pour monter une bassinnette. Je n'en ai jamais montée, mais il me semble qu'on doit bien avoir assez d'un après-midi pour faire ça, non?"

Vous reconnaissez ici les caractéristiques du mâle typique: minimiser les problèmes gigantesques de leur conjointe adorée.

C'en était trop pour la très enceinte fille que je suis. Je l'ai laissé à son stylo rouge en me disant: "Tant pis, je vais me démerder toute seule." J'ai foutu une brassée de serviettes dans la laveuse, j'ai peinturé les moulures de la chambre et j'ai boudé tout la fin de semaine devant le peu de compréhension de l'amoureux.

Alors, voilà, mon homme a appris une nouvelle expression ce week-end: faire son nid.

Et il a également appris qu'il ne faut jamais pousser une fille enceinte à bout...

Patience, chéri, il te reste trois loooooongs mois à m'endurer!

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