28 mai 2008

Un monde étrange

C’est étrange. Il y a des choses vraiment bizarres qui se passent chez moi. Je commence à me demander si je suis la seule à vivre ce genre de truc. Dites-moi que c’est pareil chez vous s’il vous plaît, question que je me sente moins seule dans mon monde.
Tenez, par exemple, mon panier à linge sale. Malgré tous mes efforts, même en foutant une dizaine de brassées dans la laveuse chaque jour, je n’en vois jamais le fond. C’est déprimant non? De la magie, je vous dis. Chaque fois que j’ai le malheur de dire « Cool, après cette brassée, j’ai fini! », il y a des vêtements sales qui apparaissent dedans. En y pensant bien, je pourrais tenter de vendre le concept à Alain Choquette. Fortune assurée. Les spectateurs seraient complètement mystifiés devant ce tour de magie des plus originaux.
Un autre truc vraiment incompréhensible se situe du côté de mon lave-vaisselle. Pourquoi il n’est jamais vide quand je dois le remplir? Qu’est-ce qui explique que c’est toujours le foutoir dans l’armoire où sont rangés les plats de plastique? Pourquoi il ne reste jamais de ketchup dans la bouteille quand j’en ai besoin?
Aussi, je commence à avoir peur des sacs à lunch de mes filles. Je crois qu’ils se nourrissent secrètement des cuillères que j’y mets chaque jour pour le yogourt ou la compote de pommes. Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai acheté des petites cuillères à dessert pour remplacer celles disparues mystérieusement. Mais là, je crois avoir trouvé les coupables. Reste à me peaufiner un plan d’attaque pour que cesse la disparition de ces ustensiles. Vous avez une idée géniale?
J’aimerais bien comprendre un jour le phénomène qui veut que les jours de la semaine, je sois incapable de tirer mes héritières du lit et que les jours de congé, elles se lèvent avant même que le soleil ait eu la même idée. Je pense à leur jouer un tour un de ces quatre. Le vendredi soir, au moment du coucher, je vais leur dire que demain, nous sommes lundi. Bernées, elles le seront assurément et bonjour la grasse matinée pour moi!
Étrange aussi de constater que les poulettes n’ont jamais de devoirs au retour de l’école. Par contre, dans la nuit, une force mystérieuse se glisse tout doucement dans leur sac à dos pour inscrire à leur agenda des exercices à compléter ou une dictée à corriger. Quoi qu’il en soit, c’est toujours dix minutes avant que le bus ne se pointe au coin de la rue qu’elles allument qu’elles avaient finalement des trucs à faire pour la journée même.
Je pourrais aussi vous parler du rouleau de papier de toilette qui est toujours vide, de la pinte de lait dans laquelle il ne reste, plus souvent qu’autrement, qu’une seule gorgée, des dizaines de bas orphelins qui traînent sur ma sécheuse (que je conserve dans l’espoir de retrouver leurs douces moitiés), et quoi d’autre?
J’ai l’impression qu’il y a quelque chose qui cloche avec le modèle d’enfant qu’on m’a donné. Chaque fois que le téléphone sonne, c’est immanquable, elles se garochent sur moi ou elles se mettent à crier à tue-tête. Sans compter qu’elles n’ont jamais faim pour le souper, mais qu’il reste toujours beaucoup de place dans leur bedon pour du dessert.
Je ne surprendrai personne en disant que même si leurs yeux sont remplis de dodos, qu’elles baillent aux corneilles, que leurs paupières sont devenues beaucoup trop lourdes, ni Félixe, ni Maxim ne sont fatiguées et refusent d’aller au lit.
Pis quand elles se chicanent, c’est toujours de la faute de l’autre. Ce ne sont jamais elles qui ont laissé traîner leur pyjama dans le salon, qui ont renversé un verre de jus dans la chambre, qui n’ont pas fait couler l’eau du bain et qui n’ont pas flushé la toilette.
Étrange non?

20 mai 2008

Elle est cheap votre fée des dents?

On a eu de la visite à Proulxville la semaine dernière. De la belle et grande visite.
En fait, on sait qu’elle est passée, mais personne ne l’a vraiment vue. On le sait parce qu’elle a laissé sa trace.
C’est du moins ce que prétendait Filou, à 6 h 40 du mat, l’autre jour, alors qu’elle s’est pointée dans le cadre de la porte de ma chambre, montrant fièrement le dollar que la fée des dents lui avait laissé sous son oreiller en échange d’une petite incisive que ma loulou y avait glissée.
On a donc jasé fée des dents au boulot. Semble que celle qui dessert mon territoire est un tantinet radine. Dans certains secteurs de la ville, elle pourrait laisser jusqu’à 5 $ la quenotte. À ce prix-là, une fois que tout le dentier de Filou aura passé sous l’oreiller, la fée sera ruinée! Une chance que les paiements (sans intérêt!) seront étalés sur quelques années…
J’avoue que je vois ici un beau sideline. Parce qu’à ce prix-là, dans le coin où j’habite et où les enfants sont nombreux, je ferais fortune dans le temps de dire. Avis à tous ceux qui cherchent à s’endetter en étudiant longuement en dentisterie, l’avenir est dans le ramassage de dents sous l’oreiller. Où puis-je postuler svp?
N’empêche que c’était un grand moment dans la (petite) vie de ma cocotte. Ça faisait quelques semaines que sa tite dent branlait et cherchait à s’enfuir de sa gencive. Elle est finalement tombée un soir où, pour mal faire, je n’étais pas là.
Le drame. Les pleurs. La panique totale il paraît. Selon les dires de la gardienne, Filou aurait trouvé très difficile de perdre sa dent. La promesse de retrouver une surprise le lendemain matin, gracieuseté de la fée, ne réussissait pas à sécher ses larmes.
Pourtant, elle a l’habitude la cocotte. À deux ans et demi, à la suite d’un accident, elle s’était retrouvée avec deux palettes en moins. Je pensais qu’elle était armée pour faire face à cette situation. Et dans mes souvenirs, j’avais l’inéluctable impression que c’était cool de perdre une dent et d’attendre avec hâte la visite de la fée en se demandant ce qu’elle laisserait cette fois-ci.
Même si par chez nous, les dollars faisaient place aux 25 sous et à une Caramilk, j’adorais perdre des dents et j’ai voulu croire très longtemps à cette histoire. D’ailleurs, selon un sondage mené par l’Association dentaire canadienne, 25 % des adultes canadiens croient à la fée des dents!
Pis là, j’ai l’impression de ne plus reconnaître ma peanut avec son sourire tout édenté. Et elle rush la cocotte pour manger sa pomme et ses carottes. D’ailleurs, ce n’est pas toujours chic de la voir aller au souper! Heureusement que c’est temporaire. Déjà, on voit la nouvelle venue se frayer une place entre ses petites dents de lait. Mais ce qu’elle a l’air immense cette dent aux côtés des autres! Quelle époque disgracieuse que l’arrivée des dents d’adulte dans un sourire d’enfant, non?
Bah, c’est pas grave. Dent pas dent, elle est belle pareil ma cocotte.

13 mai 2008

J'ai le coeur brisé

Déjà. C’est déjà terminé.
C’est fini nous deux pis j’ai le cœur brisé.
Je le savais que ça finirait de même. J’aurais dû m’écouter.
Je m’étais quand même attachée moi.
J’ai peine à croire que je ne m’endormirai plus jamais avec toi. Que lorsque j’ouvrirai les yeux le matin, tu ne seras plus là à côté de moi. Que l’on ne partagera plus de bain ensemble. Que tu ne deviendras qu’un souvenir. Que tu rejoindras les autres qui étaient là avant toi.
Tout est allé si vite. Je n’ai pas pris le temps de te savourer. De te déguster à petites doses pour faire durer le plaisir. Au contraire, dès le départ, je me suis jetée tête première dans notre histoire. Oubliant du coup toutes les promesses que je m’étais faites. Je n’apprendrai donc jamais?
Pourtant, au départ, je te regardais du coin de l’œil, me disant que tu serais pareil comme les autres. Je n’avais pas envie d’embarquer là-dedans, encore une fois, pour finir déçue. Je ne voulais pas avoir l’impression de perdre mon temps. Je ne désirais pas investir dans une relation qui ne m’apportait pas ce que je voulais, qui ne m’amènerait pas où j’aime aller.
Ç’a été difficile de ne pas succomber à ton charme malgré tout. Tu étais constamment sous mes yeux. J’entendais parler de toi à tout moment. Et puis, tes belles promesses de bon temps que nous passerions ensemble m’ont fait flancher.
Je t’ai pris dans mes bras et j’ai dit : « Ok, je te laisse entrer dans ma vie. Ok, je vais te faire de la place dans mon horaire chargé. Mais ne me déçois pas. Sois honnête. Sois ce que tu dis que tu es. »
Je t’ai pris dans mes bras et je t’ai observé sous toutes tes couvertures. Je t’ai regardé par devant, par derrière. Et je n’ai pas haïs ce que j’ai vu. Au premier regard, tu me plaisais bien.
Je t’ai pris dans mes bras et je t’ai senti. Jamais je ne me lasserai d’une telle odeur. J’ai approuvé le choix de ton parfum.
Je t’ai pris dans mes bras et je t’ai amené chez moi. Je voulais te connaître au plus vite. Savoir ton histoire. Découvrir tes vilains défauts. Tes petites habitudes.
Dès les premiers instants, tu m’as fait crouler de rire. Même que je repense à certains instants et je souris encore malgré la peine que j’ai. Plus tard, tes propos m’ont fait réfléchir. Je me suis questionnée sur moi-même. Sur ma façon de mener ma barque. Quand tu m’as raconté pour ton père, ma gorge s’est nouée, mes yeux se sont embués. En si peu de temps, nous avions réussi à être proches. Très proches même.
Je t’apportais partout. Tu étais toujours avec moi. Dès que j’avais une minute, je me demandais où tu étais rendu et je me plongeais avec joie dans le récit de tes rocambolesques aventures.
Et puis, même si je la sentais venir, c’est avec tristesse que j’ai vu le mot « fin » arriver dans notre histoire. Je ne pouvais pas me résoudre que tout ça soit terminé après ces quelques semaines merveilleuses passées ensemble.
C’était trop beau pour être vrai.
Je sais. Je sais. Vous me direz que je referai confiance à nouveau un jour. Qu’un autre me fera rire. Que je passerai de merveilleux instants encore à deux.
Mais pour l’instant, je ne suis pas prête à m’investir. Je ne veux pas brûler toutes les étapes du deuil. Je veux prendre le temps de bien faire les choses. Relaxer aussi. Apprécier ces moments de solitude.
Ma prochaine virée à la librairie attendra donc un peu. Quoique le dernier Guillaume Musso a l’air drôlement bon…

06 mai 2008

Une peine d'amitié

Vous avez entendu parler de la nouvelle brique de Denise Bombardier? Elle jase amitié. La madame, après avoir écrit sur ses relations avec les hommes, son enfance et son besoin d’amour, entre autres, a noirci moult pages blanches sur ses relations avec ses nombreuses (dit-elle) copines et sur celles qui ne portent plus le titre d’amie-de-Madame-B.
Mes chères amies serait d’ailleurs né après une peine d’amitié. Oui, oui, vous z’avez bien lu. L’écrivaine ne s’en vante pas, mais ce serait une chicane de fefilles qui lui aurait donné l’idée d’écrire sur le sujet.
Surprise, je l’ai été grandement. Est-ce que l’on se chicane encore avec nos amies passé 50 ans? Je pensais que ce genre d’histoire était réservé exclusivement aux cours de récréation. Je croyais qu’en grandissant, on apprenait à tempérer nos propos, à mieux accepter l’autre, à pardonner plus facilement, à discuter plutôt qu’à se chanter des bêtises, mais surtout à se soutenir quoi qu’il advienne.
Mais faut dire que l’on n’a pas tous le tempérament flamboyant et intempestif de l’auteure, quand même. Et heureusement! Parce que le mot amitié serait probablement rayé du Petit Robert dans le temps de le dire!
Ça m’a portée à réfléchir toute cette histoire. Quelle était la place de l’amitié dans ma vie? Quelle importance mes copines avaient-elles pour moi? Et surtout, peut-on dire à son amie : « c’est fini nous deux »?
On ne parle pas souvent « rupture amicale » dans les magazines ou dans les soupers de filles, et pourtant il y en aurait long à dire sur le sujet. Il y a comme une espèce de tabou entourant l’idée que l’on puisse volontairement mettre fin à une amitié entre deux personnes.
Ça m’est arrivé l’été dernier. Après plusieurs années d’amitié tissée serrée, j’ai mis fin à cette relation qui m’épuisait. Ç’a cogité dans ma tête pendant plusieurs semaines, voire quelques mois. Je n’étais plus certaine que j’étais l’amie dont elle avait besoin. Celle à qui elle s’attendait. Et surtout, celle qu’elle méritait d’avoir.
Je n’étais plus d’accord avec ses choix. Ses idées. Je n’étais plus capable de la supporter dans ses décisions ni de respecter la tangente que prenait sa vie.
Chaque fois que je voyais son numéro sur l’afficheur, j’avais peur de répondre. Pas par ennui de lui parler, mais parce que j’étais effrayée à l’idée de la blesser, de dire quelque chose qu’elle n’avait pas envie d’entendre. J’étais craintive qu’une fois encore une bombe ait explosé dans sa vie et que je doive me transformer en motivateur pour lui remonter le moral.
Ces conversations me grugeaient une énergie folle. Me bouleversaient outre mesure. Je n’en pouvais tout simplement plus. J’avais envie de rire, de déconner, de placoter de tout et de rien, d’imaginer nos vies dans vingt ans et d’en rire. Bref, je voulais du positif dans ma vie.
C’est là que les questionnements sont arrivés. Étais-je une amie déloyale qui se défile à la moindre difficulté? Étais-je sans cœur de ne plus être capable de supporter ma copine dans ces moments difficiles?
J’ai longtemps voulu en parler avec d’autres personnes, question de me faire une tête sur la question. Je n’ai jamais été capable de le faire. Par peur des réponses sans doute.
Je fêterai bientôt le premier anniversaire de cette rupture. Et ça ne fait pas très longtemps que le tout est digéré et accepté. Même si j’ai compris qu’au fil du temps, nos valeurs changent, que nos vies prennent des chemins différents, que l’on aspire à autre chose en amour comme en amitié.
Reste qu’au plus profond de moi-même, elle restera toujours ma meilleure amie. Et que si demain elle appelle, je serai là.

Deux Noëls, deux fêtes, deux chambres, ....

Quand j’étais petite, j’avais la ferme conviction qu’une famille, c’était une maman, un papa et des enfants qui vivaient tous dans la même maison. Je pensais que c’était la norme puisque dans ma classe, nous étions tous dans la même situation. Ou à peu près.
Bon, il y avait bien Annie qui habitait toute seule avec sa mère et son grand frère. Mais son père était mort quand elle avait quatre ans. Ça ne comptait donc pas. Il y avait aussi l’autre Annie qui demeurait seule avec sa mère. Mais un vendredi sur deux, on voyait apparaître devant l’école la Mercedes de son père, qui venait la chercher pour le week-end.
On la trouvait cool la Annie. Elle avait deux chambres à coucher, la chanceuse. Mieux encore, elle fêtait deux fois Noël, elle déballait des cadeaux de fête à deux reprises et elle se bourrait la fraise dans le chocolat à Pâques deux fois plutôt qu’une. En prime, son papa faisait plein d’activités amusantes avec elle : ciné, resto, parc. Vraiment, elle avait une belle vie la copine. On l’enviait tous.
Je me souviens même d’avoir balancé l’idée à mes parents alors qu’ils se parlaient un peu plus fort qu’à l’habitude. « Pourquoi vous ne divorcez pas? » Du haut de mes huit ans, je ne réalisais pas tout ce qu’impliquait une séparation. Je n’y voyais que les bons côtés, moi.
Au fil des années, j’ai compris qu’un divorce, ce n’était pas aussi simple qu’une double part de bonbons d’Halloween. Qu’une séparation amenait beaucoup plus de Kleenex trempés, d’yeux bouffis et de cœurs brisés qu’autre chose. Annie n’était plus la seule dans le lot. Elle a été rejointe par Catherine, Karine, Charline, Valérie, Patricia, Pascale et Caroline.
Elles étaient tellement rendues nombreuses dans leur situation que j’en étais devenue l’exception. La seule qui ne changeait pas de lit aux deux fins de semaine et qui ne fêtait pas Noël plus d’une fois. Pis j’avoue que je ne détestais plus l’idée…
Parce qu’au dépouillement de l’arbre de Noël, j’aimais être blottie entre ma mère et mon père pour développer les cadeaux que le père Noël m’apportait. Parce que je n’avais pas envie de manger une fondue au chocolat à la Saint-Valentin en tête à tête avec un seul de mes parents. Puis surtout, je n’avais pas envie que l’on m’impose la venue d’un nouveau conjoint qui débarquerait avec ses enfants chez moi.
Quand l’idée m’est venue de fonder une famille, c’était très clair dans ma tête que j’allais offrir la même chose à mes futures héritières. Mes filles grandiraient entourées de leurs parents. Point à la ligne.
Aujourd’hui, on compte plus d’une famille sur cinq à Sherbrooke qui est monoparentale. J’en suis. Mes filles ont donc deux chambres, deux Noëls, deux Pâques, deux anniversaires.
Peut-être qu’elles n’ont pas le modèle d’une famille unie dont rêvent toutes les mamans du monde. Mais je crois et j’ose espérer qu’elles ont gagné beaucoup plus qu’elles ont perdu au compte.
Maxim et Félixe voyagent peut-être entre la maison de maman et celle de papa, mais elles ont pu rencontrer des gens formidables. Nathalie et Myriam, les deux femmes qui ont partagé la vie de leur père depuis notre séparation, entre autres. Du coup, mes puces se sont retrouvées avec de nouveaux grands-parents qui les gâtent dès que l’occasion se présente.
Parce que même si mes loulous ne soupent pas à la même table chaque soir, j’ai la certitude qu’elles sont beaucoup plus heureuses entourées de parents qui s’entendent que lorsqu’ils s’entredéchiraient.
J’ai réussi ce que je voulais. Mes filles grandissent entourées de leurs deux parents. Point à la ligne.