Il n’y a personne qui m’avait prévenue quand même temps que la balance montrait des chiffres de plus en plus gros, dû à mon état de grossesse, que grandirait en moi un tout nouveau sentiment : la culpabilité.
Coupable tout d’abord de siroter un touti verre de vin alors que tous les spécialistes de la terre s’entendent pour dire que c’est la pire chose alors que pousse en nous un magnifique petit bébé pétant de santé.
Coupable par la suite de ne pas avoir fait ces foutus exercices d’étirement du périnée tant préconisés par les sommités en la matière. Faut dire qu’une épisiotomie longue comme ça, ça culpabilise une madame assez longtemps. Du moins, le temps que prend à guérir une épisio, soit six à huit semaines.
Coupable de retourner au boulot alors que le bébé tout neuf n’a pas encore son permis de conduire, qu’il n’est pas sur le point d’aller à son bal de finissant ou que l’idée de retirer ses REER ne lui a pas effleuré l’esprit encore.
Coupable de ne pas avoir allaité les deux ans prescrits par l’Organisation mondiale de la santé et d’avoir osé mettre de l’Enfalac dans le biberon à sept mois pour l’une et à un an pour l’autre les exposant ainsi délibérément à de nombreuses allergies et maladies.
Coupable d’être de mauvaise humeur à 4h du matin alors que bébé se réveille pour la huitième fois en hurlant, car il a perdu sa foutue suce. « À quoi ai-je bien pu penser de lui foutre une suce dans la bouche alors qu’elle aurait pu se démerder toute seule avec son puce? »
Coupable ensuite de ne pas être capable de sevrer de sa suce sa grande de deux ans.
Et pourquoi pas se sentir coupable de donner une petite sœur à l’autre lui imposant ainsi nombre de responsabilités qui viennent avec une titre de grande sœur.
Coupable de ne pas démontrer d’enthousiasme à la 44e lecture de Caillou Le petit pot parce que la lecture en bas âge c’est tellement bénéfique sur le succès futur de son enfant dans la sphère scolaire.
Coupable de ne pas avoir su prévenir une gastro, une otite, une sinusite, une pneumonie.
Coupable de ne pas avoir vu arriver la prune sur le front, le bleu sur la cuisse, la graffigne sur le genou.
Coupable de « ploguer » ses rejetons devant la télé et de ne pas profiter des beautés que la nature nous offre en allant jouer dehors.
Coupable de ne pas offrir des repas quatre étoiles trois fois par jour ainsi que des collations hautement équilibrées.
Coupable. Je me sens tout le temps coupable. Coupable de n’importe quoi. Bref, c’est toujours de ma faute.
Culpabilité. Culpabilité. Culpabilité.
Elle est toujours présente. Toujours là. Elle ne « punch » jamais « out » elle? Ne va jamais en vacances? N’a pas de journées de congés prévus à sa convention collective?
Avec des conditions de travail aussi moches, elle devrait se voter un bon mandat de grève et faire du piquetage. Elle devrait demander une réduction importante de ses heures de travail ainsi qu’une bonification de ses congés flottants. N’importe quel arbitre en matière de négociation syndicale ne s’y opposerait, j’en suis certaine.
Pour toutes les mères membres de l’Alliance mondiale pour la non-culpabilité, autorisez rapidement la culpabilité à prendre une année, non une décennie, sabbatique. Nous avons autre chose à faire que de se morfondre avec les « j’aurais donc dû » et les « si j’avais fait ça… »
29 janvier 2008
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