Dans la vraie vie, je suis historienne. Du moins, c’est ce qui est inscrit sur mon relevé de prêts étudiants du ministère de l’Éducation. Un de mes dadas d’étudiante, un de mes sujets de recherche fétiche, c’était la mort. Je sais, ce n’est pas très jojo comme thématique, pour ne pas dire tabou. Mais ça me passionnait, rien n'était plus étranger ni plus noir que le coup fatal qui frappe chacun de nous, mais aussi rien n’était plus captivant pour moi.
Je me suis donc farci tout Philippe Ariès, l’Historien de la mort en Occident. Puis aussi Serge Gagnon qui s’est attardée à la chose au Québec pour tenter de comprendre comment nous avons vécu la mort au fil des décennies en sol québécois.
Et ce matin, avec la nouvelle qui est tombée sur Pierre-Hugues Boisvenu, j’ai eu besoin de me replonger dans mes livres, dans mes travaux. Pour tenter de comprendre. Pour chercher une parcelle de réconfort dans cette nouvelle tragédie qui frappe cette famille.
Mais rien.
Je n’ai rien trouvé de réconfortant.
Rien. Niet. Nada.
Pas une seule phrase n’a réussi à m’expliquer le drame des Boisvenu.
Tout ce que j’ai déniché, c’est que la mort s’est éloignée de nous. Avant, les gens mourraient à la maison, on les veillait au salon, on les enterrait au cimetière de la paroisse. Aujourd’hui, on meurt à l’hôpital, on reste à la morgue, on est exposé au salon et on est incinéré.
Pendant plus d'un millénaire, depuis le VIe siècle après Jésus-Christ jusqu'à la Renaissance, la mort ne faisait pas peur aux gens. Elle était l'un des grands moments de la vie. Aujourd’hui, on rejette la mort. On ne veut pas d’elle dans nos maisons.
Pour se sortir de sa peine, Pierre-Hugues Boisvenu a choisi de donner un sens à la mort de sa fille aînée, Julie. Grâce au combat qu’il a mené depuis trois ans, il a repris goût à la vie. En entrevue, l’an dernier alors que La Nouvelle le nommait Leadership 2004, il m’avait dit : « Dès le lendemain de la mort de Julie, ma conjointe Diane m’a dit qu’il fallait trouver un sens, une raison, une cause à ce drame. C’est une phrase que je n’ai jamais oubliée. Une phrase qui me fait avancer chaque jour. »
Nous sommes une quinzaine de représentants des médias dans la petite cuisine de Monsieur Boisvenu. Tous ont les yeux rouges, remplis de larmes. Personne ne parle. Après le point de presse, tous se mettent en file pour faire une accolade à cet homme au cœur grand comme ça qui ne méritait certes pas que le malheur frappe a nouveau chez lui.
En arrière-plan, on entend la petite Julie-Anaé qui babille. Du haut de son un an, elle ne mesure pas la grandeur du drame que vit son grand-père. Mais l’entendre jacasser de la sorte a quelque chose de réconfortant. Elle nous rappelle que la vie continue… tout simplement.
Je n’avais pas besoin de retourner dans mes bouquins. Seulement me rappeler la petite Julie-Anaé.
29 décembre 2005
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