09 mai 2007

La leçon d'Onil

Le premier talon de paye que j’ai reçu était identifié du Mont Orford. Chaque week-end de l’hiver 1990-1991 j’étais enfermé dans la grande cafétéria de cette saison de ski. Un job que j’ai eu à la volée. À 14 ans, n’entrait pas qui veut sur le payroll de l’entreprise. Ce sont mes cinq pieds huit pouces qui m’ont permis de décrocher le job.
Ce n’était pas seulement la passe de saison promise avec le 5,30$/l’heure qui m’attiraient. Je voulais travailler, même si ce n’était que pour passer la moppe avais-je supplié à Onil Langlois, le responsable de l’embauche. J’ai réussi à le convaincre et comme je n’avais pas l’air de mes 14 ans, deux semaines plus tard, je me pointais à mon entraînement avec mon nouveau tablier et mon tout premier nametag identifié à mon nom.
La première chose que mon nouveau patron m’a dite c’est : « Ne perdez jamais l’idée que vous ne savez pas qui vous servez. Peut-être que cette personne sera votre prochain employeur et vous n’aurez jamais une deuxième chance de faire une première impression. »
Cette phrase m’a marquée. Je ne l’ai jamais oubliée. Chaque fois que je rencontre une nouvelle personne, ces quelques mots me reviennent en tête. On ne sait jamais à qui on parle. On ne connaît pas l’impact que peut avoir cette personne plus tard dans notre vie.
C’est un peu ce qui est arrivé la semaine dernière quand j’ai appelé au garage pour une inspection, car ma garantie arrive à échéance bientôt. Le préposé au service, sans même voir l’état de ma voiture, sans même me questionner sur l’usage que j’en faisais, sans rien m’a grandement surprise en me disant que je devais me préparer à une facture de 632$ plus taxes, rien de moins.
Ébranlée, je raccroche. J’appelle mon père, mon beau-frère mécano, je parle à mon collègue Steph. « What the fuck 700$ pour une inspection? Est-ce moi ou on exagère un brin? » Je n’ai pas une minoune, c’est une 2004. Même si je déteste aller au garage, mes changements d’huile sont faits à temps et tout le tra la la.
J’ai donc sorti le manuel d’entretien de ma voiture. C’est bel et bien inscrit que je dois faire inspecter ma courroie de distribution (timing belt) à 50 000 km. Mais pourquoi veut-il me la remplacer alors qu’il ne l’a pas vue? Pourtant on inscrit dans mon manuel que ce remplacement est prévu à 100 000 km.
C’est tout simplement ce sentiment d’insécurité qui m’habitait que j’ai voulu traduire dans ma chronique de la semaine dernière. Comme je n’y connais à peu près rien dans le domaine, j’ai toujours le sentiment de me faire avoir. Je n’ai pas dis que tous les mécanos de la terre étaient des crosseurs de la pire espèce.
Toute la semaine j’ai entendu parler de cette chronique. Les histoires d’honneur de gens confrontés à des garagistes sans scrupule se sont succédé dans ma boîte vocale et dans ma boîte de courriels. Je ne suis pas la seule à me questionner sur les pratiques de l’industrie automobile, c’est clair.
C’est certain qu’il y a des garagistes honnêtes et qui ne cherchent pas à gonfler leur compte de banque avec l’ignorance mécanique de leurs clients et je leur lève mon chapeau. Mais n’empêche que c’est questionnant de savoir que la plupart des commis au service des garages de la région sont rémunérés au bonus. Plus la facture est élevée, plus la paye est grosse.
Peut-être que le commis qui m’a répondu aurait eu à apprendre d’Onil. On ne sait jamais à qui on a affaire. Surtout si c’est une journaliste qui écrit une chronique d’humeur semaine après semaine. Une journaliste quelque peu insécure en matière automobile.

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