Quand j’étais petite, j’avais la ferme conviction qu’une famille, c’était une maman, un papa et des enfants qui vivaient tous dans la même maison. Je pensais que c’était la norme puisque dans ma classe, nous étions tous dans la même situation. Ou à peu près.
Bon, il y avait bien Annie qui habitait toute seule avec sa mère et son grand frère. Mais son père était mort quand elle avait quatre ans. Ça ne comptait donc pas. Il y avait aussi l’autre Annie qui demeurait seule avec sa mère. Mais un vendredi sur deux, on voyait apparaître devant l’école la Mercedes de son père, qui venait la chercher pour le week-end.
On la trouvait cool la Annie. Elle avait deux chambres à coucher, la chanceuse. Mieux encore, elle fêtait deux fois Noël, elle déballait des cadeaux de fête à deux reprises et elle se bourrait la fraise dans le chocolat à Pâques deux fois plutôt qu’une. En prime, son papa faisait plein d’activités amusantes avec elle : ciné, resto, parc. Vraiment, elle avait une belle vie la copine. On l’enviait tous.
Je me souviens même d’avoir balancé l’idée à mes parents alors qu’ils se parlaient un peu plus fort qu’à l’habitude. « Pourquoi vous ne divorcez pas? » Du haut de mes huit ans, je ne réalisais pas tout ce qu’impliquait une séparation. Je n’y voyais que les bons côtés, moi.
Au fil des années, j’ai compris qu’un divorce, ce n’était pas aussi simple qu’une double part de bonbons d’Halloween. Qu’une séparation amenait beaucoup plus de Kleenex trempés, d’yeux bouffis et de cœurs brisés qu’autre chose. Annie n’était plus la seule dans le lot. Elle a été rejointe par Catherine, Karine, Charline, Valérie, Patricia, Pascale et Caroline.
Elles étaient tellement rendues nombreuses dans leur situation que j’en étais devenue l’exception. La seule qui ne changeait pas de lit aux deux fins de semaine et qui ne fêtait pas Noël plus d’une fois. Pis j’avoue que je ne détestais plus l’idée…
Parce qu’au dépouillement de l’arbre de Noël, j’aimais être blottie entre ma mère et mon père pour développer les cadeaux que le père Noël m’apportait. Parce que je n’avais pas envie de manger une fondue au chocolat à la Saint-Valentin en tête à tête avec un seul de mes parents. Puis surtout, je n’avais pas envie que l’on m’impose la venue d’un nouveau conjoint qui débarquerait avec ses enfants chez moi.
Quand l’idée m’est venue de fonder une famille, c’était très clair dans ma tête que j’allais offrir la même chose à mes futures héritières. Mes filles grandiraient entourées de leurs parents. Point à la ligne.
Aujourd’hui, on compte plus d’une famille sur cinq à Sherbrooke qui est monoparentale. J’en suis. Mes filles ont donc deux chambres, deux Noëls, deux Pâques, deux anniversaires.
Peut-être qu’elles n’ont pas le modèle d’une famille unie dont rêvent toutes les mamans du monde. Mais je crois et j’ose espérer qu’elles ont gagné beaucoup plus qu’elles ont perdu au compte.
Maxim et Félixe voyagent peut-être entre la maison de maman et celle de papa, mais elles ont pu rencontrer des gens formidables. Nathalie et Myriam, les deux femmes qui ont partagé la vie de leur père depuis notre séparation, entre autres. Du coup, mes puces se sont retrouvées avec de nouveaux grands-parents qui les gâtent dès que l’occasion se présente.
Parce que même si mes loulous ne soupent pas à la même table chaque soir, j’ai la certitude qu’elles sont beaucoup plus heureuses entourées de parents qui s’entendent que lorsqu’ils s’entredéchiraient.
J’ai réussi ce que je voulais. Mes filles grandissent entourées de leurs deux parents. Point à la ligne.
06 mai 2008
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1 commentaire:
Les deux dernières phrases sont les plus importantes et je pense tout comme toi!!! Vivez heureux ! ;)
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