29 avril 2009

Le vent tourne

Six mois ont passé.
Il y a eu toute une bise qui a secoué nos vies. Un vent fort, cinglant et violent.
Qui nous a tous donné froid dans le dos. Un vent à écorner les bœufs. Une rafale qui a tout bousculé, sens prendre le temps de s’arrêter vraiment, de nous avertir.
Et croyez-moi, ce n’était pas du vent.
Ian, celui que j’avais choisi pour être le père de mes poulettes, est parti plus vite que le vent. Celui avec qui je partageais mes joies, mes angoisses, mes frustrations et mes peines de parent a manqué d’air. Une virulente pneumonie a rendu mes poulettes orphelines en moins de quatre jours. Celui qui faisait parti de mon quotidien depuis 20 ans s’est envolé contre vents et marrées.
Il a semé le vent, nous avons récolté la tempête.
Nous avons pleuré, crié, hurlé notre peine, notre frustration aux quatre vents, partout, en tout sens.
Mais il fallait continuer.
Parce que c’est difficile que de vivre seulement de l’air du temps. Nous nous sommes tenus debout. Nous avons déplacé de l’air. Nous avons parfois marché contre le vent. Mais nous avons vaincu l’ouragan du deuil.
Nous avons regardé notre rose des vents et pris la direction du positif.
On peut même dire que le vent a tourné. Que les séquelles laissées par cette brusque tempête s’estompent tranquillement. Doucement comme une petite brise faible et modérée.
Qu’il y a l’optimisme dans l’air.
Il fallait du temps. Juste du temps.
Mais certaines choses sont, par contre, allées plus vite que le vent. On pourrait même dire qu’elles sont arrivées en coup de vent. En quelques semaines, avec l’énergie du vent, nous avons pris notre vie en main.
Filou et Maxim continuent de sourire à la vie. De croire qu’elles n’auront pas toujours à marcher contre le vent. Papa leur manque atrocement, oui. Mais elles savent qu’elles ne sont pas seules. Que le vent tourne.
Jamais je n’oublierai celui qui faisait parti de ma vie depuis deux décennies. La personne avec laquelle j’aimais le plus parler de mes filles. Avec qui j’aimais le plus rire des niaiseries de Maxim. Qui partageait mon inquiétude quand Filou est passée sous le bistouri ne sera plus jamais là au bout du fil, au bout de son courriel, à mes côtés.
Mais le vent tourne.
Et voilà, ce vendredi, six mois pile poil après que nous ayons porté Ian en terre, nous nous envolerons, les poulettes, l’amoureux et moi, dans une nouvelle demeure. À l’abri des intempéries de la vie, souhaitons-le.
Une nouvelle maison, pour une nouvelle famille. De nouveaux et de beaux défis qui se profilent à l’horizon. Qui, malgré l’intense peine qui nous habite depuis un demi-calendrier, remettra du soleil dans nos yeux.
Contre vents et marrées, nous nous sommes tenues debout.
Nous pourrions même dire que nous avons le vent dans les voiles maintenant.

21 avril 2009

Perte de contrôle

À la seconde près où une deuxième ligne rose est apparue sur ce petit bâtonnet rempli de pipi, il a fallu dire adieu à votre manie de tout contrôler. La control freak en vous devait démissionner à cet instant-même.
Alors que vos hormones HCG augmentaient en flèche, il vous fallait mettre de côté pour toujours cette folle envie d’avoir une main mise sur les horaires, les nuits, les repas. Fini le temps où votre agenda était réglé au quart de tour. Où vous gériez votre quotidien comme bon vous semblait.
Parce qu’être maman et être une maniaque du contrôle, ça ne va pas ensemble. C’est deux concepts contraires. Comme deux aimants inversés. Impossible à jumeler. Un duo irréalisable.
Par exemple, il sera insensé de penser pouvoir prévoir si vous aurez des maux de cœur, des brûlements d’estomac, de la fatigue, de la haute pression, du diabète, l’ensemble de ces réponses ou aucune de ces réponses pendant les 40 semaines que dureront la grossesse.
Il faut aussi oublier la possibilité de décider vous-même du sexe de la merveille qui logera au creux de vos entrailles pour les prochains mois. Toute votre vie, vous avez rêvé être la mère d’une belle poupée blonde bouclée aux yeux bleus? Ce sera sans aucun doute un petit monstre aux cheveux noirs et raides comme de la broche qui entrera dans votre vie.
Il est aussi impensable de prédire quand et comment se déroulera la livraison du dit colis: de façon rapide ou sans fin? Facile ou compliquée? En siège, en postérieur ou normal? Césarienne, induction ou naturelle? Épisiotomie ou non?
Être mère et contrôle, ça ne fonctionne pas. Ça ne peut pas vivre dans la même phrase. Ça n’a aucun sens. Aucune possibilité.
Vous prévoyez un souper en amoureux ce soir? Soyez assurée que bébé fera une de ces crises de colique à l’instant-même où vous déposerez votre fesse droite sur la chaise devant ce superbe filet mignon.
Vous rêvez de vous clencher un dix heures de sommeil en ligne? Il est fort probable qu’à la minute où vous poserez la tête sur l’oreiller, un bruit de gastro parviendra à vos oreilles depuis la chambre de la plus vieille (pas de danger que ça arrive au-dessus du bol… Nenon. Maman = pas de contrôle, n’oubliez pas).
Vous mourrez d’impatience de connaitre les derniers potins? C’est écrit dans le ciel que vous n’aurez pas le temps de composer le numéro de téléphone de votre meilleure amie qu’une troisième guerre mondiale se déclarera entre vos héritiers.
Ce soir, c’est décidé. Rien ne viendra contrecarrer vos plans. Vous avez loué le dernier blockbuster que vous regarderez paisiblement, écrasé dans le divan en buvant une Stella Artois. Tout est planifié. Erreur! Parce que ce sera ce soir-là que votre poulette aura choisi pour commencer à avoir peur des monstres et des loups-garous qui se cachent sous son lit et qui lui veulent beaucoup de mal. Après plusieurs heures de négociation, de «je t’assure cocotte que les monstres, ça n’existent pas», de câlins et de réconfort, vous vous écroulez complètement épuisée dans votre lit et on repassera pour le film.
C’est inscrit «réunion importante avec le patron» au calendrier? Il est fort probable qu’une tempête de neige s’abatte sur Sherbrooke ce jour-là, amenant fermeture d’école et par conséquent deux marmots sur les bras. Pas très pratique pour négocier la prochaine augmentation salariale…
Vous voulez devenir mère? Rayez dès maintenant le mot «contrôle» de votre vocabulaire. Le reste? Comme du beurre dans la poêle. Simple et facile.

15 avril 2009

J'aimerais comprendre svp

J'aimerais que quelqu'un m'explique.
Ça ne doit pas être si compliqué à comprendre, j'imagine, puisque depuis des lunes nous envoyons des soldats là-bas sans que personne n'y voit vraiment rien à redire.
C'est moi sûrement qui est nulle. Pas vite. Cloche. Idiote.
J'aimerais qu'on m'explique pourquoi que l'on se casse le bicycle à envoyer des Canadiens (1 640 de Valcartier seulement) en Afghanistan pour défendre on-ne-sait-pas-trop-quoi depuis sept ans maintenant.
J'aimerais qu'on m'explique pourquoi nos dirigeants acceptent que leurs citoyens meurent (117 à ce jour dont 2 femmes) pour une cause en laquelle la population canadienne ne croit même pas.
J'aimerais qu'on m'explique pourquoi l'on dépense des millions dans ce dossier alors qu'on en aurait besoin grandement ici.
Mystère.

14 avril 2009

L'art de se mettre les pieds dans les plats

Vous savez dans l'art de se mettre les deux pieds dans la merde, s'improviser chef et mettre au point un nouveau potage mettant en vedette marijuana et de naphta, c'est assez champion.
Que l'on mette sa propre vie en danger dans l’espoir de se rendre millionnaire en concoctant de l’huile de cannabis, ça ne me regarde pas. Mais jouer avec celle des autres, ça énerve un brin.
Depuis quelques temps, plusieurs apprentis chimistes se sont retrouvés avec des souvenirs peu sympathiques de leurs expériences : brûlures au visage et même perte de vie.
Z’avez pas pensé à utiliser tout ce beau temps libre, que vous semblez avoir, à d’autres activités plus pertinentes pour vos voisins? Genre mettre vos connaissances scientifiques en pratique et devenir animateur pour les Petits débrouillards?

http://www.cyberpresse.ca/la-tribune/sherbrooke/200904/14/01-846302-une-soupe-au-pot-senflamme-et-brule-les-deux-cuistots.php

Maman 2009 - Mode d'emploi

Comment devient-on une bonne maman en 2009? Simple si l’on se fie aux statistiques qui indiquent que plus de 87 000 nouveaux bébés ont vu le jour en 2008. Compliqué si l’on en juge le mode d’emploi ici-bas.
La future maman 2009 aura bien pris soin d’ingérer 0,4 mg d’acide folique quotidiennement trois mois avant la conception de son bébé. Elle aura cessé toute consommation d’alcool et aura diminué sensiblement ses rendez-vous avec la machine à café du bureau. Elle se sera mise en forme en visitant le gym de trois à cinq fois par semaine. Bien sûr, il sera impossible pour elle de penser à fumer une touille.
Son poids sera santé. Aucun signe de cholestérol ne sera détectable dans son sang. Une visite chez son médecin lui aura d’ailleurs permis de mettre tous les atouts de son côté pour fabriquer la huitième merveille du monde.
Dès qu’un petit colimaçon aura signé un bail de neuf mois dans son utérus, la maman 2009 prendra bien soin d’ingérer un litre de lait par jour, de se farcir cinq à dix portions de fruits et légumes quotidiennement et comblera le manque à gagner en fer en avalant une Materna chaque matin.
Entre son boulot et les tâches ménagères, elle prendra le temps de lire une multitude de bouquins sur l’univers fabuleux de la maternité. Ainsi, elle saura comment réagir lorsque son utérus expulsera son locataire. Elle serait d’ailleurs une candidate hors pair à Tous pour un portant sur la vie in utero et pourrait même enseigner à la faculté de médecine le cours Obstétrique 101.
La maman 2009 se sera bien informée sur le bon type de peinture à utiliser dans la chambre de bébé et aura ainsi refusé l’accès aux murs aux trucs bourrés de plomb. Elle aura bien mesuré la largeur entre les barreaux de la bassinette pour s’assurer de sa conformité. Bien sûr, elle se sera rendue au poste de police afin que l’on vérifie la sécurité de son siège d’auto.
Les semaines qui précéderont la délivrance auront servi à remplir à ras bord le congélo de repas santé, à laver et relaver les nombreux pyjamas et cache-couches qui remplissent les tiroirs de bébé, à apprendre par cœur les numéros de téléphone d’urgence: Info-santé, clinique médicale, mamie et à faire des exercices d’étirements du périnée.
Afin d’être certaine de vivre un accouchement rêvé, sans péridurale-césarienne-épisiotomie, elle aura suivi bon nombre de formations sur la méthode Bonapace, sur l’efficacité des endorphines sur le contrôle de la douleur et sur l’importance d’être détendue en période de latence pour permettre la bonne-oxygénation-des-muscles-ce-qui-aidera-grandement-au-col-de-l’utérus-à-se-dilater-sans-problème. Elle aura prévu des alternatives en cas de complication: acupuncteur, ostéopathe et hypno-naissance.
Naturellement, elle sera la championne de l’utilisation du ballon de naissance. Son plan de naissance sera rédigé et photocopié en plusieurs exemplaires destinés au médecin traitant, à l’infirmière, au préposé aux bénéficiaires, à la sage-femme, au gynéco, à l’accompagnante, à l’anesthésiste, à la réceptionniste et peut-être même à l’agent de sécurité qui surveille le stationnement.
Une fois le petit trésor poussé à la vie, elle demandera gentiment à l’obstétricien d’attendre que les pulsations du cœur cessent dans le cordon ombilical avant de le clamper. Elle privilégiera un contact peau à peau plutôt que l’incubateur pour réchauffer sa nouvelle raison de vivre. Dès que le bain de larmes d’émotions sera essuyé, elle lui donnera le sein afin de favoriser l’allaitement.
Elle aura discuté de la pertinence d’injecter de la vitamine K au bébé avec son conjoint. La maman 2009 lui aura d’ailleurs vanté les mérites de l’implication du papa dans l’éducation du marmot afin de faciliter la création d’un lien significatif entre eux. En ce sens, ils auront établi ensemble une routine afin que chacun fasse sa part équitablement dans l’éducation de leur pupille.
Plus difficile qu’il n’en paraît, devenir maman. Me demande bien combien des 87 000 nouvelles mères de 2008 ont suivi ce mode d’emploi à la lettre. Parce qu’il y a de quoi devenir complètement timbrée, mais surtout, il y a danger d’oublier notre meilleur atout: l’importance de se faire confiance. Tout simplement.

07 avril 2009

Le sommeil n'est jamais là au bon moment

17 h 04. Je suis coincée dans le trafic. Nenon, je ne suis pas perdue dans la métropole. Je suis bel et bien sur une rue de la Reine des Cantons-de-l’Est. Sur le boulevard de l’Université pour être plus précise pis j’ai une envie insoutenable de fermer l’œil.
17 h 17. Alors que je poireaute devant le Triolet, je me prends à rêver de courir tout droit dans mon lit à mon arrivée à la maison. À me cacher sous ma couette et à ronfler jusqu’à demain. À chacun ses rêves…
17 h 32. J’ai réussi à ne pas m’endormir ni sur le boulevard, ni sur la 410. Même chose sur la King. Mais il était temps que j’arrive à Proulxville parce que la paupière se faisait de plus en plus lourde. La schnout qui tombe n’aide en rien en mon état semi-végétatif.
17 h 38. Désolation. Mon plan de dodo ne pourra pas fonctionner. Premièrement, les draps ont été oubliées dans la laveuse ce matin, ce qui fait qu’ils ne sentent pas les roses. Faudra repartir le cycle. Deuxièmement, les poulettes réclament haut et fort que je remplisse leur bedon, sinon elles porteront plainte à la police-des-parents, dit Filou. Vaut mieux ne pas prendre de chance.
18 h 25. Les estomacs sont pleins. Les assiettes reposent dans le lave-vaisselle. Les lunchs de demain sont même prêts. Aurai-je le droit, enfin, de m’étendre sur le divan (les draps ne sont toujours pas séchés) et de fermer l’œil zuste une minute? «Maman, peux-tu m’aider s.v.p.? Il faut que je trouve un objet ancien pour l’école…». Partir à la quête d’antiquités et roupillon ne vont pas de pair, malheureusement.
19 h 20. Je compte les minutes me séparant du moment tant attendu où enfin je pourrai flirter avec Morphée. Il reste exactement 1 h 40. À 21 h, si je suis chanceuse, mes héritières seront couchées, ronfleront et, en théorie, n’auront plus besoin de mes services.
20 h 20. Il reste 40 minutes.
20 h 50. «Maaaaax! Va laver tes dents. C’est l’heure du dodo (pour toi pis pour moi!)».
20 h 51. Le téléphone sonne. C’est Dany. «Pis, ton week-end, ça été?». Bla bla bla… Je passe tout droit. Il est 21 h 25. Bah… tant qu’à être encore debout, j’en profite pour regarder Tout sur moi.
21 h 58. Et si je prenais un bon bain?
22 h 25. Je vérifie mes courriels. Tout à coup qu’une catastrophe soit arrivée, pendant que je faisais de la soupe, et que je ne sois pas encore au courant?
23 h 35. J’ai lu le blogue de Karine, celui de Dominique. J’ai zyeuté si la banlieusarde avait posté une nouvelle recette. J’ai vérifié le solde de mon compte de banque. Ai écouté le nouveau clip de la Mère indigne. Me suis tapée quelques rondes de poker sur Facebook. Me suis assurée que je n’avais pas raté de nouveaux courriels. Heureusement, tout est sous contrôle. Je peux aller dormir tranquille.
23 h 45. Je me relève. J’ai oublié de me laver les dents.
23 h 48. Couchée, cachée sous l’édredon, je cherche le sommeil. Ne trouve rien. 0 h 20. Je ne suis toujours pas endormie. Je tente une approche nouvelle visant à me faire sombrer. Je compte mes respirations. 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7…. Zut! Demain, c’est le 7 avril. Demain, Filou a de la natation avec l’école. Je saute hors du lit et m’empresse de trouver le maillot de ma puce et autres trucs nécessaires à l’apprentissage de la nage en eau profonde.
0 h 30. De retour sous les draps. Toujours pas fatiguée. Toujours les yeux grands ouverts. Toujours incapable de dormir.
0 h 50. Suis sous le point de me fâcher. Suis sous le point de perdre patience. Suis surtout pas sous le point de dormir par contre.
1 h 10. Je passe le temps. Je rêve à nos prochaines vacances. Je me demande où aboutira le Centre de foires. Je prie pour que le CH fasse les séries.
1 h 20. Je joue à la pitourne. Je me tourne de côté. Je me retourne de l’autre. Rien à faire.
1 h 25. Ma liste de menus de la semaine est dressée. Ma liste de trucs à faire en vue du déménagement est planifiée. Ma liste d’épicerie est faite.
1 h 35. Je ne dors toujours pas. Je me jure que, demain soir, dès 20 h, je suis au lit. Et tant pis pour la police-des-parents.