30 avril 2006

À bas le Gala Ménagis!

Il y a deux brassées qui sèchent sur la corde. J’ai frotté de fond en comble les deux salles de bain. Il y a une recette de saucisses à l’italienne qui cuit dans la mijoteuse et aussi deux douzaines de muffins aux framboises qui se font dorer dans le four.
C’est sans compter l’aspirateur passé, les draps lavés, les planchers frottés et la vaisselle rangée. Bref, depuis mon lever, je n’ai pas chômé. Alors, pouvez-vous m’expliquer pourquoi j’ai ce foutu sentiment de culpabilité qui me colle aux fesses alors que je suis étendue au soleil avec un livre ?
Non, mais c’est vrai qu’à la place, je pourrais, je ne sais pas, nettoyer la voiture, ranger la remise, repenser le rangement du garde-robe, faire le tri dans les vêtements d’été des filles, désherber mes plates-bandes ou écrire ma chronique.
Mais non, à la place, je me pogne le beigne sous un soleil de plomb. Je profite du 22 degrés qu’affiche mon thermomètre extérieur. Quelle fainéante que je suis !
C’est terrible non ?
Il me semble que ce serait la journée parfaite pour repeindre la clôture ou pour laver les fenêtres de toute la maison. Ben non, madame-la-paresseuse s’amuse à attraper des coups de soleil. Franchement.
Vous êtes aussi découragés que moi n’est-ce pas ? Les week-end passent rapidement, il vaudrait mieux les mettre à profit. Parce que ce n’est pas lorsque le lundi se pointe sur le calendrier, que je trouverai le temps de faire de ces trucs essentiels à notre santé mentale.
Parce que c’est connu. Si on retrouve des petites mousses de poussières sous notre frigo, si nos pots d’épices ne sont pas classés par ordre alphabétique, si nos vêtements ne sont pas rangés par couleurs dans la garde-robe et pire encore, si nous n’avons pas planifié l’entièreté de nos repas pour la semaine, c’est clair que nous sommes incompétentes. Que tenir une maison va au-delà de nos capacités.
Après vérification, il y a non seulement de la mousse sous mon frigo, mais sous ma cuisinière et sous mon lave-vaisselle également. Mes petits pots d’épices sont sans dessus dessous. Mes vêtements d’hiver côtoient mes vêtements d’été sans aucune distinction au niveau des couleurs. Et je n’ose pas vous parler de ma planification anarchique de notre alimentation.
Bref, je suis nulle. Complètement à chier. Ce n’est pas demain la veille que je remporterai le trophée Ménagis de la ménagère la plus appréciée du public.
Il ne me reste plus qu’à A) m’ouvrir les veines. B) me dénoncer à l’Association des Flylady (pour les curieux, visitez le www.flylady.com). C) Contacter Roxanne Saulnier de l’émission Le Grand ménage pour qu’elle organise ma maisonnée. D) L’ensemble de ces réponses. Je suis un cas désespéré.
Mais en en réfléchissant bien, je me questionne. Est-ce que je serais plus heureuse si c’est nickel sous mes électroménagers ? Est-ce que mes enfants grandiront mieux si mon aneth se retrouve tout juste à côté de mon basilic ? Est-ce que je suis susceptible de développer un cancer des yeux si ces derniers voient un chandail rouge, un pantalon noir et une blouse rose dans le même coin du garde-robe ?
Je ne crois pas finalement. Cette obsession de la guenille et du Monsieur Net est complètement idiote à bien y penser.
Je vote donc pour que l’oisiveté, lire au soleil, les bains d’une heure, le cinéma en après-midi, l’écoute en rafale de tous les épisodes de 24h chrono en une seule journée, les balades en voiture à la campagne ou la navigation sur le net devraient être des tâches ménagères à part entière.
Parce que ces temps de repos, de relaxation me permettent de recharger les batteries. Elles font que je suis une maman plus douce, une journaliste plus éveillée, une amie plus à l’écoute, une patronne moins impatiente. Et ce n’est pas ça le plus important ?
À bas le Gala Ménagis !

25 avril 2006

La leçon d'Annie

Mon amie Annie est partie pour la gloire. À 25 ans et maman de trois fillettes, je pensais bien que le Canal famille était fermé, qu’elle avait assez fait pour peupler la collectivité québécoise. Mais non, elle vient de m’apprendre qu’un quatrième papillon a pris son bedon pour y faire son cocon. Je n’en reviens pas. Je suis béate d’admiration.
Dans notre société où tout doit aller très vite, où l’argent et les biens matériels priment, Annie fait des bébés comme d’autres font des tourtières. Ma copine va à l’encontre des conventions. Et c’est tant mieux!
Ne pensez pas qu’elle n’a d’autres choses à faire que de changer des couches et allaiter. N’imaginez pas qu’elle a un quelconque problème mental qui la pousse à enfanter. Parce que si c’est le cas, il faudra vous mettre un doigt dans l’œil jusqu’au coude.
Inhalothérapeute aux soins intensifs dans un grand hôpital, Annie comble ses temps libres en accompagnant des futures mamans dans leur grossesse et leur accouchement. Elle a fait de la maternité une véritable passion. Pendant que d’autres dépenses des milliers de dollars en trucs de toutes sortes, ma copine a mis sa famille au centre de sa vie.
N’empêche que quatre loulous à la table, ça fait augmenter radicalement une facture d’épicerie. Mais pas assez pour l’énerver, ni elle, ni son chum, ni même son gérant de banque.
« Les enfants, c'est la richesse. Plus tard, tout ce que j'aurai acheté, ça ne vaudra presque plus rien, mais mes enfants seront toujours là. Leurs rires, leur bonheur, ça entrent directement dans mon cœur. C'est ça la monnaie de mon cœur. »
Ça porte à réfléchir hein ?
Mais reste que j’ai de la difficulté à concevoir qu’elle sera encore un an sans dormir. Je ne comprends pas comment elle réussira à concilier les besoins de tous ces petits êtres sans craquer. Sans regretter le temps où tout était si simple, où elle n’avait qu’à s’occuper de son petit nombril.
Je sais, quatre enfants ce n’est pas la mer à boire. Que d’autres ont fait cinq, six, dix enfants. Mais vous, quatre bambins, seriez-vous capable ? Personnellement, j’avoue qu’entre le travail et mes deux loulous, j’en pédale un coup. J’ai comme un blocage à voir plus que Maxim et Félixe sur mon portrait de famille.
Pourtant, même si Annie est à la tête d’une marmaille aussi imposante, elle ne manque jamais de temps pour elle. « Je prends le temps de prendre le temps. Ce soir, la vaisselle n’est pas faite et les jouets traînent dans le salon, mais personne ne va en mourir », m’a-t-elle dit.
Elle n’a pas tort la copine.
Levez la main celles qui d’entre vous lisent le journal avec un sentiment de culpabilité parce que le plancher de la cuisine ne reluit pas? Combien d’entre vous se sentent de mauvaises mères parce le souper ne comportait pas les quatre groupes alimentaires du Guide alimentaire canadien? Dites-moi, c’est quand la dernière fois que vous avez pris une heure pour vous sans avoir un petit diable à l’oreille qui insinuait qu’il y avait mieux à faire que de jouer les paresseuses dans le bain?
Je serais la première à lever la main. La première à crouler sous les normes sociales. La première à dire que je ne veux plus d’enfants parce que je veux être capable d’avoir du temps pour moi, mais surtout afin de pouvoir offrir ce qu’il y a de mieux à mes puces.
Mais ce soir, Annie m’a servi toute une leçon. Laurie, Justine Léanne et son nouveau locataire dans son bedon sont tout ce qu’on a besoin pour être heureuse. Il faut cesser de chercher plus loin.

17 avril 2006

Trinquons à Suzanne!

Suzanne et moi avons des parcours de vie assez semblables. Entre nos marmots qui nous occupent à temps plein, notre boulot qui nous captive et notre quotidien qui nous rappelle que les journées devraient avoir 36 heures, nous trouvons quand même le temps de se parler tous les jours, ou presque.
En cinq ans, des liens se sont tissés. Des liens assez solides je dirais. Si bien que lorsqu’une d’entre nous voyait un obstacle se dresser sur son chemin, l’autre était là pour elle. Tout simplement. C’était naturel. Les coliques de bébé, la confection des purées bio, ma séparation, la mort de son père. Rien ne nous échappait.
Puis, ça lui est tombé dessus, par un beau matin ensoleillé. Comme ça. Tout bonnement. Comme ça arrive à 429 autres Canadiennes chaque semaine.
Suzanne venait d’allaiter Sébastien quand elle a remarqué une bosse sur son sein gauche. « Pas une autre mastite », a-t-elle pensé. Depuis 13 mois maintenant qu’elle nourrit son loulou, elle en n’était donc pas à son premier pépin dû à la lactation.
Mais voilà, même si son médecin espérait trouver autre chose, c’est bel et bien un cancer qui se nichait au cœur de son nichon.
Un cancer qui avait déjà fait assez de ravages dans sa famille. Sa grand-mère, sa mère et sa tante étaient déjà passées par le même chemin.
Moins de trois semaines plus tard, Suzanne passait sous le bistouri. Elle ressortira du bloc opératoire avec un sein en moins, peut-être, mais avec des tonnes d’angoisse et d’inquiétude sur les épaules.
Quand on a 34 ans, que l’on est maman de deux enfants qui n’ont même pas cinq ans, que l’on a toute la vie devant soi, il y a plus jojo à faire que de caser des séances de chimiothérapie dans son horaire.
Mais comme les 22 000 autres Canadiennes qui ont reçu le même diagnostic qu’elle cette année, Suzanne s’est retroussée les manches et a affronté cette maladie avec toute la force qu’il l’animait.
Il y a eu des hauts, mais beaucoup de bas. Des cheveux en moins sur le coco, des nausées à en plus finir, des pertes de mémoire, de nombreux rendez-vous chez d’autant de spécialistes ponctuaient ses journées.
Malgré tout, chaque matin, Suzanne remerciait le ciel de lui avoir laisser la chance de voir ses enfants grandir une journée de plus.
Deux ans plus tard, ma copine peut dire qu’elle a vaincu avec succès cette rude bataille. Mais cette année seulement, 5 300 Canadiennes n’ont pas eu cette chance.
Et c’est pour ces femmes que la compagnie Vincor a choisi de remettre les profits de la vente de ses vins rosés, ceux arborant une capsule rose, à la Fondation du cancer du sein du Québec.
L’objectif? Remettre 100 000$ pour la recherche.
Une bonne raison de trinquer à la santé de Suzanne, mais à cette femme sur neuf qui aura à livrer bataille au cancer du sein dans sa vie. Parce qu’au-delà des statistiques, il y a une personne, une famille, la vie.

11 avril 2006

Jumeler sommeil et parentage : Mission impossible?

Personne ne m’avait avertie. Personne ne m’avait mise au courant. Quand j’ai signé mon contrat de maman, je croyais qu’à deux mois, les bébés ça faisaient leur nuit et que c’était un dossier réglé, de l’histoire ancienne.
Mais ç’a l’air que non.
Parce que après avoir maîtrisé l’envie de boire aux deux heures la nuit, je pensais que c’était acquis que les loulous passaient ce temps dans les bras de Morphée plutôt que dans ceux de leur maman.
Précisons tout d’abord que ce stade a tout de même été réglé quand mes filles ont célébré le 10e mois de vie sur terre. C’est quand même huit mois de plus que ce à quoi je m’étais préparée.
Il y a tout d’abord les dents. Camilia, Tempra et Orajel se culbutent dans les aires dentaires. Et évidemment, on réclame les soins calmants à la minute même où notre tête se pose sur l’oreiller.
Après vérification, le dentier de mes filles est complet. Leurs gencives devraient, en théorie, me laisser dormir maintenant.
Mais non. Ça serait trop beau. Sont venus par la suite les cauchemars, les terreurs nocturnes, les méchants monstres voleurs de bonnes nuits. Même si maman fait de beaux rêves de princes charmants ou de voyages extraordinaires, ceux-ci sont plus souvent qu’autrement entrecoupés par des cris de petites filles au bord de la crise d’hystérie.
Puis se sont succédés les rhumes, otites, varicelles, bronchites, crises d’asthme, gastros et fièvres inexpliquées. Il doit bien y avoir une raison qui explique pourquoi les premiers débordements gastriques commencent toujours passé minuit. Pourquoi la température augmente subitement à 1h du matin. Pourquoi les oreilles infectées font toujours plus mal entre le coucher et le lever du soleil. Quelqu’un peut m’expliquer s.v.p.?
Quand, enfin, on voit la lumière au bout du tunnel, que les microbes sont allés voir ailleurs si nous y étions, voilà donc que les pipis au lit nous font sortir de nos draps beaucoup plus tôt que prévu. Soupir. On s’entend qu’il y a plus jojo à faire que de changer des lits et des pyjamas à trois heures du mat.
C’est sans compter la fois où Félixe est tombée en bas du lit ou celle où Maxim s’est cognée le front sur sa tête de lit. Ou encore la nuit où la sonnerie du téléphone a réveillé toute ma ribambelle.
Si on fait le total, dans les cinq premières années de vie de mes petites, j’en ai passé au moins deux et demie à ne pas dormir. Ne vous demandez pas d’où viennent les poches qui logent sous mes yeux, mon incapacité à tenir éveillée plus tard que minuit et mon impatience.
Et j’entends déjà mon père qui me dit : « Oui, pis à l’adolescence tu dormiras pas plus parce que tu vas te demander où elles sont la nuit! »
Je sais papa, je sais.
Bref, un constat s’impose. Les nuits, lorsque nous sommes parents, ne sont jamais acquises.

03 avril 2006

Malheureuse d'un printemps

Vendredi après-midi, quand j’ai mis le cap sur Sherbrooke, après une semaine à dévaler les pentes au mont Saint-Anne, j’avoue que j’avais le cœur gros, pour ne pas dire brisé.
C’est que je savais que j’étais à 300 kilomètres de la fin de ma saison de ski. Quand j’ai vu la grande pancarte verte annonçant que la prochaine sortie était Saint-Élie d’Orford, je savais que dans moins de trois minutes, mes skis iraient «étérniser» dans ma remise jusqu’en novembre prochain et ça me déchirait tellement.
Les retrouvailles avec ma pelouse, ma chaise longue, mon patio et mon BBQ n’avaient pas réussi à me faire sourire.
De penser qu’il faudrait voir à la composition de mon potager, à la division de mes vivaces et fertiliser les plates-bandes ne réussissait même pas à mettre un baume sur ma tristesse.
Bref, j’avais le cafard. Je maudissais tous ceux qui avaient fait la danse du soleil pour voir apparaître le printemps beaucoup plus tôt. Ceux qui avaient soudoyé Dame nature pour qu’elle chasse l’hiver.
Quand j’y pense, je suis peut-être idiote un brin.
Je cherche d’autres qualificatifs, et hélas, je ne trouve rien de mieux pouvant me décrire.
Les gens normaux, lire ceux qui ne sont pas idiots comme moi, rêvent de sable chaud, de soleil luxuriant, de crème solaire, de palmiers dansant au gré du vent, de vagues qui cassent et de pina colada lorsque le froid et la neige s’abattent sur le Québec.
Pour le commun des mortels, les visites de la Muraille de Chine, des pyramides d’Égypte, de la Tour Eiffel, de la Statue de la Liberté, de la barrière de corail, de la Tour de Pise représentent le summum d’un voyage extraordinaire.
Mais, rappelons-le, je suis idiote.
Pour d’autres, partir à l’aventure dans un safari au Kenya, traquer le caribou à l’île d’Anticosti, taquiner le doré dans un lac du parc de la Vérendrye est la quintessence d’un périple réussi.
Enfin, certains pousseront l’audace à sauter en parachute à 10 000 pieds d’altitude, à se mouiller en descendant la rivière Colorado en rafting ou à s’époumoner en gravissant le Kilimandjaro.
Mais pas moi.
À vrai dire, j’ai déjà commencé à compter les dodos qui séparent le printemps de l’hiver.
On annonce 60 centimètres de neige à Météomédia? Je jubile. La marmotte voit son ombre? Je me réjoui. L’Almanach du peuple prédit un hiver long? J’exulte.
Mon adrénaline, je la retrouve sur mes deux planches. Ma passion, je la vis en montagne. Me retrouver avec des engelures aux pieds et aux mains est loin de me rendre malheureuse.
Jongler entre les moments de découvertes extraordinaires et les moments d’angoisse inquiétante me remplit de fébrilité.
Le défi de maîtriser les virages correctement, de négocier les bosses, de m'ajuster constamment m’excite au plus haut point.
Me retrouver au bas d’une piste, à l'embarcadère d'une chaise, les jambes mortes, le souffle presque coupé, mais la tête remplie de décors majestueux est synonyme de béatitude totale, de bonheur.
Plusieurs me trouvent idiote de délirer autant sur ce sport. De ne pas choisir juillet pour la prise de mes vacances annuelles. De me les geler à 800 mètres d’altitude.
Je suis peut-être idiote, mais au moins, je suis heureuse.