01 novembre 2010

Sauter comme un lapin

On m'a encore réveillée à 2 h du mat. Et encore à 4 h.

Et le comble, c'est que ce n'était pas la petite qui réclamait son dû.

Ben non, c'est la maudite lapine qui faisait des cabrioles dans sa cage. Lily-Bunny, elle a décidé que pour faire une Josée Lavigueur d'elle-même, c'était beaucoup mieux au beau milieu de la nuit. Qu'il n'y a rien de meilleur qu'un clair de lune pour fortifier ses mollets. Qu'un casse-croûte, ça se digère beaucoup mieux quand il fait noir. Qu'une litière, c'est un magnifique jouet pour passer le temps quand tout le monde ronfle dans la cabane.

J'ai l'impression qu'elle s'entraîne pour les Olympiques des grandes oreilles. Discipline convoitée: cacophonie pour les 8 livres et moins. Objectif visé: réveiller le plus de gens possible pendant le plus grand nombre de nuits possible. Espoir de médaille? Très fort!


Bref, je ne sais pas ce qui se passe avec Lily-Bunny, mais j'ai la grande impression qu'elle vient d'entrer dans une phase très bruyante de son existence et qu'elle souhaite un peu de solidarité de notre part.

Lily-Bunny, c'est le lapin que j'ai «hérité» suite au décès du père de mes filles. À vrai dire, j'aurais espéré une villa à Aspen ou une Jaguar, mais bon, j'ai accepté avec bonheur ce «cadeau». D'autant plus que ça faisait grandement plaisir aux poulettes de retrouver leur copine à fourrure noire et blanche qu'elles voyaient auparavant un week-end sur deux.

Elles avaient déjà le coeur brisé en 1000, pas question d'en remettre sur le tas en les privant de leur bestiole adorée. Personnellement, je trouve que c'est plus amusant d'épousseter un bibelot de chat, mais je ne suis pas cruelle et égoïste au point d'avoir refusé d'héberger cette bête à quatre pattes.

Au début, je nettoyais sans trop chialer la cage de la lapine. Je faisais des détours pour aller à l'animalerie afin de lui acheter des petites gâteries. Je m'installais avec elle devant la télé pour la flatter des heures durant.

Un jour, alors que je voulais la nourrir, elle m'a mordu le doigt, la vilaine (pour ne pas dire la salope)! Dès ce moment, je me suis mis à craindre la bestiole. J'ai délégué la tâche de la nourrir à Filou. Celle de nettoyer la cage à Max. En échange, moi, je veillais à acheter le matériel nécessaire à la maintenir en vie. Après tout, c'est leur lapine, pas la mienne.

Puis, l'attrait de la nouveauté est passé. Lily-Bunny attirait de moins en moins l'attention. De plus en plus souvent, Filou oubliait de remplir le bol d'eau de la bête. Je devais demander et redemander à Maxim qu'elle s'occupe de rendre le condo de Lily plus habitable.

De semaine en semaine, mon ton montait. Mon impatience grimpait. Ma haine de la lapine devenait de plus en plus tangible.

«Les filles, c'est le temps de changer la litière.» «Filou, as-tu pensé à donner à manger à Lily ?» «Maaaaax, as-tu lavé le bol d'eau du lapin ?» Ces phrases ont été dites tellement souvent chez moi que si j'avais été payée cinq cennes la fois, je serais multimillionnaire aujourd'hui et j'aurais une équipe spéciale qui veillerait sur notre héritage poilu.

Considérant que:

- Je ne suis pas millionnaire;

- Je ne suis plus très patiente;

- Que je suis à bout de me faire réveiller à 2 heures du matin;

- Que la lapine nous apporte plus de chicanes que de rigolades. Plus de frustrations que de joies;

- Qu'elle est sur le bord de finir en civet de lapin (la recette de Jean Soulard est excellente, soit dit en passant) à 350 F dans mon four...

Il fallait réagir. Trouver une solution.

«Mes poulettes, maman a parlé avec la propriétaire d'une animalerie aujourd'hui et vous savez quoi? Elle est prête à prendre Lily-Bunny pour faire de l'élevage.»

«Euh... C'est quoi «faire de l'élevage» ?» me demande une Filou des plus craintives qui imaginait déjà sa lapine sur une rôtissoire badigeonnée de moutarde de Dijon.

«La madame de l'animalerie va mettre Lily avec un monsieur lapin dans une cage et ils vont faire plein de bébés tous les deux. Ça va être chouette pour elle, non?»

Mes deux filles ont acquiescé avec un sourire convaincant.

C'est bien pour dire. Mes filles, à neuf et douze ans, savent déjà que finir ses jours en sautant comme un lapin, c'est très cool.

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