16 novembre 2009

Je ne passerai jamais au travers

Je rends les armes.

Je déclare forfait.

Je n'y arriverai pas. C'est certain. C'est écrit dans le ciel gros comme ça.

Je lève mon drapeau blanc devant elle.

Elle est là, tout juste au coin de la rue (pis elle n'est pas très longue ma rue!), qui me regarde et me nargue.

Je ne passerai jamais au travers.

C'est clair. Limpide. Évident.

Quand Max hurle à l'injustice parce que je lui demande de ramasser sa chambre et que je me dis que ce n'est qu'une toute petite parcelle de ce qui m'attend de l'adolescence, je panique.

Comment ferai-je pour passer au travers cette foutue adolescence?

Comment ferai-je pour naviguer au travers ses sautes d'humeur? Comment ferai-je pour ne pas lui arracher la tête quand elle me parlera comme si j'étais la dernière des trous de pet? Comment ferai-je pour ne pas pleurer quand elle arrivera à la maison avec un piercing sur la langue pis un code barre tatoué dans le cou?

Comment ferai-je pour ne pas sombrer dans l'ennui quand ça fera six jours qu'elle dormira chez des amies et qu'elle ne se souviendra que très peu de l'endroit où elle reçoit son courrier?

Comment ferai-je pour ne pas tomber dans la nostalgie du temps où les câlins, les mots d'amour, les belles discussions, la bonne humeur étaient disponibles à profusion?

Comment ferai-je pour ne pas péter un câble quand ça fera quatre heures en ligne qu'elle parle au téléphone et douze jours consécutifs qu'elle chat sur MSN?

Comment réussirai-je à dormir quand je la saurai partie faire la fête chez des copains?

Comment vais-je réussir à ne pas mourir d'une attaque de stress intense quand je la verrai quitter la maison au volant de ma bagnole?

Comment négocierai-je avec tous ces soupirs, toutes ces crises, toutes ces frustrations qui habiteront notre maison entre ses 13 et 17 ans?

Comment serai-je capable de ne pas l'enfermer à double tour dans sa chambre afin qu'aucun garçon ne l'approche?

Comment ferai-je pour garder mon calme quand le directeur de l'école m'appellera pour m'annoncer que ma grande ne s'est pas présentée en classe ce jour-là?

Est-ce qu'adolescence rime nécessairement avec frustration et stress, panique chez les parents?

Les couches, les nuits blanches, les purées, le terrible two, c'est la petite bière.

* * *

Elle grandit ma poulette. Elle grandit à la vitesse grand V. Pis ça me fait peur.

Vendredi soir. L'amoureux a un souper avec des collègues. Filou est partie à une fête d'amies. «Cool Max, nous sommes que toutes les deux. As-tu envie qu'on se commande une pizz et qu'on loue un film?» lui ai-je demandé m'imaginant déjà collée sur ma grande sur le divan à nous gaver de pop corn et à rire devant Les confessions d'une accro du shopping.

«Ah! non Maman. C'est trop poche de ne rien faire un vendredi soir. Je veux aller chez une amie.»

«Euh… c'est poche passer une soirée avec ta mère?»

Elle ne m'écoutait déjà plus. Ma préado avait déjà sauté sur le téléphone pour ébaucher des plans «tellement plus intéressants» avec Aurélie.

Pis elle est partie. Avec son grand sourire et pas une once de remord d'avoir refusé ma proposition «full poche».

Et moi, j'étais dans le cadre de la porte, complètement traumatisée. «Déjà?» me suis-je dit. L'adolescence cogne déjà à ma porte?

Je n'ai eu qu'une envie: me sauver en courant.

2 commentaires:

Anonyme a dit...

Bienvenue dans le club... Le pire c'est les peines d'amour... Mais tu sais quand tu reçois une lettre comme j'ai reçu de l'école hier tu es au ange et tu es fière de ton ado qui a été choisi coup cœur des profs pour son niveau Wow! Wow!

Josée Lapointe Pape a dit...

Même scénario de génération en génération, ta grand-mère est passée par là, ta mère est passée par là, maintenant c'est à ton tour ma belle Geneviève, il n'y a rien à faire pour un ptit cœur sensible de maman...